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TriKoala
12 août 2012

La maladie de Crohn, le témoignage de Lily la fée

Suite à mon petit article sur La maladie de Crohn, tout un combat... J'ai été contactée par quelques personnes qui se sont senties très concernées. Des échanges se sont créés. Je vous livre ici, le témoignage touchant de Lily la fée (avec son accord bien sûr), sur son combat quotidien. Même en le lisant 3 fois, beaucoup d'émotions en découlent encore.
Elle est l'auteur du blog http://lily-la-fee.over-blog.com/, n'hésitez pas à faire un saut chez elle, et/ou à montrer votre soutien :)

 

Ce témoignage se base sur notre échange de mail.
[...] signifie que le mail a été tronqué car c'est une partie personnelle.
Dans le premier mail, je la remerciais pour son commentaire. Voici sa réponse :

Lily la fée, le 2 aout 2012 :

Coucou

Tu as pensé à moi, je suis flattée!
Non sérieusement, tu sais au début, ça n'était pas facile pour moi d'en parler mais les médecins ont tout fait pour que je me mette dans le crâne qu'il ne s'agit pas d'une maladie honteuse mais qu'au contraire il faut en parler et cela pour plusieurs raisons:

- comme c'est une maladie ou le mental à une grande importance, se renfermer ou en avoir honte risque d'augmenter la souffrance.
- D'autre part, il peut utile que les autres soient au courant en cas de malaise ou de crise grave afin de pouvoir réagir de façon adéquate.

La maladie m'a été diagnostiquée en 2002 alors que j'avais eu 20 ans un mois auparavant. Ca été très dur à encaisser. j'ai déjà été opérée et je sais qu'il faudra recommencer.Il reste plusieurs choses avec lesquelles j'ai encore du mal à vivre: 
- bien évidemment, les douleurs, crises, la fatigue permanente...
- les autres pathologies que j'ai développé à cause de la maladie
- l'alimentation: une consommation modérée obligatoire de fibres (fruits, légumes...) et carrément interdite en cas de crise! Dans ce cas là, c'est le régime alimentaire du condamné: pâtes, patates, riz, jambon, biscottes!
- les examens médicaux qui sont tout sauf agréables et indolores
- mon corps déformé par les kilos de cortisone ingurgités (ce qui me donne le faciès d'un syndrôme de cushing) assorti d'une ostéoporose (j'ai le squelette dans le même état qu'une femme de 70 ans)
- l'humira que je m'injecte avec une seringue tous les 14 jours et pour une durée d'au moins 5 à 6 ans minimum, assorti de complications en cas de grossesse pendant la durée du traitement et qui diminue mes défenses immunitaires, me rendant vulnérable aux virus qui traînent et autres affections!
- et surtout les AUTRES! Comme il s'agit d'un handicap invisible, les gens ne se rendent pas compte de la douleur. Par exemple, comme j'ai souvent mal, mes parents et soeurs sont lassés à la longue de m'entendre dire que ça va pas, que j'ai mal, que j'ai des nausées, que je ne suis pas en forme... si bien qu'ils croient souvent que je joue la comédie pour me faire plaindre!!! 
Idem pour les gens dans le métro: il m'arrive de rester assise sur les strapontins alors que le métro est plein parce que je ne suis pas bien, je me fais insulter, reçois des remarques des autres usagers. Lorsque je tente de leur expliquer que je ne peux pas me lever, soit ils rigolent "vous êtes jeune et en pleine forme" ou alors me disent "il y a des places pour les handicapés". Oui mais voilà, elles sont tout le temps prises par des personnes pas forcément malades et comment justifier que j'ai besoin qu'ils me cèdent la place? 
[...]
Tu peux sans aucun problèmes publier mon commentaire voire même le témoignage que je viens de te livrer. Je souhaiterai que outre la reconnaissance à 100% d'une ALD par la sécurité sociale, il y ait une prise de conscience et une reconnaissance à plus grande échelle de la douleur, des besoins, du quotidien des malades. Certes, c'est une maladie moins grave que le sida, la myopathie... mais ça reste une souffrance que l'on trimballe jusqu'à perpét' malgré tout! 
Pour ce qui est des liens je n'ai rien de plus à proposer que ce qui est montré dans le reportage.
ENfin, concernant le tabac, il se trouve que j'ai arrêté parce que cela ne me disait plus rien mais qu'il m'arrive d'en griller une de temps en temps (environ 1 par mois et en période de grosse contrariété)
En effet, t'es tranquille, dès que j'ai une grosse émotion: chagrin, colère, dépression, ça marche  tous les coups = crise.
Pour limiter cela, je suis tout de même sous antidépresseurs depuis le diagnostique.
Le tabac m'a beaucoup aidé lors du diagnostique car j'étais en forte poussée, j'ai même eu droit à ma première hospitalisation un mois après, et j'avais droit au régime alimentaire dit sans résidu que je qualifie de régime du condamné! C'est le seul plaisir qu'il me restait!!!
Je me rends compte que j'ai été bien bavarde et encore, je pourrais en dire d'autre ne serait-ce qu'en racontant les examens médicaux!!!
Comme je te l'ai dis, j'en parle librement maintenant (bon un peu moins des symptômes, diarrhées et vomissement n'étant pas super glamour!!!) et je serai ravie de répondre à tes questions où à celles d'autres personnes qui veulent en savoir plus.
Je t'embrasse et te dis à tout bientôt

Lily la fée
La réponse de Trikoala (moi :p), le 3 aout 2012 :
Je te remercie de ton aide. J'espère que ça aidera à faire connaitre plus la maladie. En fait même si on connait les effets, c'est difficile de se mettre dans ta peau et imaginer tout ce que tu peux endurer.

Dans le cas de ta famille, je vois de quoi tu parles. On se plaint et ils pensent qu'on joue au malade imaginaire pour attirer l'attention.
Il y a 2 choses à voir/faire :
- emmener ta famille à un forum parlant de la maladie, un salon ou une conférence. C'est très important, qu'ils se rendent compte que d'autres personnes atteintes se plaignent de la même chose que toi, ou pire, et qu'ils ouvrent les yeux. Je pense qu'il doit exister des rdv, réunion, dans les hopitaux (ou ailleurs) pour ce qu'on appelle "les aidant", les personnes qui sont là pour nous. C'est pas non plus facile pour eux.
- là ce que je vais te dire sera peut être pas très sympa : il faut moins se plaindre, ou plutôt ce que j'essaie de dire, c'est moins se plaindre à une personne, car on pèse sur elle (attend de lire la suite, le temps que je m'explique un peu plus clairement). On lui dit toute notre souffrance, tous les jours, et cette personne se sent inutile face à ta douleur. Ce qu'il faudrait lui suggérer, c'est que faire pour que tu ailles mieux.
Par exemple avant je disais souvent "j'ai mal à la jambe", maintenant c'est complété par " j'ai mal à la jambe, ça m'aidera beaucoup si tu pouvais aller faire les courses".
J'admets que pour la famille c'est dur.

A quoi penses tu de positif pour que ça aille mieux? As tu des rêves?
Que faut-il faire en cas de malaise ou de crise? (Je t'avoue que je sais pas vraiment).

Concernant le régime alimentaire du condamné : tu veux mon avis? J'adore les pâtes, j'adore le jambon, le riz je peux en consommer tous les jours, les pommes de terres c'est pas mauvais non plus. ;p
Après je ne sais pas combien de jours, ou de mois, tu dois suivre ce régime, c'est vrai qu'à la longue, ça doit pas être facile.

[...]

Vous n'avez pas de carte de priorité (ou handicapé) pour les transports!?

Voici un site en cours de développement : http://www.bepatient.fr/
En fait il s'agit d'un site qui fait un peu carnet de santé. Tu remplis tes fiches, comment tu te sens etc. Tes fiches peuvent être envoyé à ton médecin traitant pour avoir ton suivi. Tu as également un forum pour parler avec des docteurs, spécialistes, et professionnels du droit du malade. Le site est en cours de construction (tu sais ce que c'est). Mais il est pas mal, car pour l'instant peu fréquenté, donc tu as les 2 professionnels à ta dispo, tu peux leur poster des questions.

[...]
Lily la fée , le 3 aout 2012 :

COucou

Tu peux publier' sans soucis et même mettre un lien vers le blog. J'ai déjà parlé de la maladie sur le blog.
Pour les forums, salons... l'idée est très bonne. Déjà, lorsque j'ai un rdv avec ma gastro entérologue, je demande systématiquement à mon père ou ma mère, selon celui qui l'accompagne, de rentrer aussi dans le cabinet pour entendre ce que le médecin conseille, le bilan médical... afin qu'ils soient d'une part au courant et d'autre part qu'ils sachent comment réagir.
Pour ce qui est de moins se plaindre, tu as raison à 4000% C'est psychologique, on a l'impression que ça va mieux en le disant lol! 
Par contre, une fois, j'ai demandé de l'aide et que l'on m'étende mon linge qui avait tourné car je souffrais. Mon père 'a répondu "tu y vas doucement, tu y vas à ton rythme et ça va bien aller" sauf qu'à un moment, je me suis effondrée par terre de douleur. 
J'ai demandé de l'aide. Ma soeur après m'avoir envoyé me faire voir méchamment est quand même venue m'aider à m'allonger sur le canapé. mon père lui a dit, "n'y vas pas ça sert à rien, tu peux rien faire. VU qu'elle a mal quand elle bouge, vaut mieux la laisser où elle est!" C'est surtout qu'il était à table en train de manger et qu'il ne voulait pas se déranger. Mais sur ce coup-là, j'ai eu l'impression d'être un meuble, invisible, genre c'est courant, pas de panique, laisse tomber!
C'est sûr qu'il se sent impuissant mais il est souvent carrément maladroit, voire même désagréable!
Ma mère, je ne vis pas avec elle. Quand je la vois et qu'elle me demande "comment ça va?" et que je lui répond "bah c'est pas la joie" elle me répond "de toute façon, ça va jamais" "quand est ce que tu n'as pas mal quelque part".
Tant et si bien qu'à force je me renferme et ne dis plus rien!!!
Malheureusement, le positif et moi n'évoluons pas dans le même monde! Je vois toujours le verre à moitié vide depuis que je suis affublée de ce fardeau. Néanmoins, quand cela ne va pas le tricot, la lecture, le crochet, la broderie sont une bonne thérapie.  SI je pouvais vivre de mon artisanat, je serais comblée!Je préfère la deuxième partie de ta question plus proche de la réalité: quand ça ne va pas, je rêve! J'ai toujours été une rêveuse de tout façon. 
Mes rêves à moi sont modestes mais apparemment très difficiles à atteindre: Je rêve d'avoir enfin un emploi qui me plaise ou être mère au foyer, rencontrer un homme qui ne sera pas effrayé par la maladie (ça m'est déjà arrivé, la maladie fait fuir les hommes), m'installer avec lui, faire des enfants. J'exagère mais je rêve de fonder une famille depuis ma naissance. J'ai le désir maternel dans mes veines depuis toujours et cela me manque terriblement d'autant que je vais avoir 30 ans dans un mois et demi! EN même temps, je suis très égoïste puisqu'il y a une chance sur deux que je transmette la maladie à mes enfants.
D'autre part, il faut savoir que la grossesse met la maladie au repos mais après l'accouchement, elle se rattrape avec la TVA en plus! Mais c'est pas grave, ça vaut le coup. 
EN cas de crise, c'est simple: régime sans résidu, c'est à dire sans fibres, tout ce qu'il y a de plus basique: pâtes, patates, riz, biscottes, jambon...
Repos et consultation d'urgence à l'hôpital où je suis soignée si de la fièvre apparaît et que je passe ma vie aux toilettes.
Je peux te dire que les pâtes, j'en ai ras les couettes et de plus, pour maigrir, c'est pas top du tout! Mais en période de crise, je ne digère pas les légumes. En fait, il faut suivre ce régime jusqu'à ce que ça aille mieux. EN effet, c'est une maladie où il faut constamment écouter son corps, c'est lui nous dicte ce qu'il faut faire.
Je t'ai dis qu'il fallait du repos, mais de toute façon pas le choix, là encore c'est le corps qui commande. On se sent faible, on sent que le corps ne suis plus!
Le plus handicapant en cas de crise, c'est soit de ne pas sortir de chez soi, car on peut être en crise mais malgré tout être en forme (je sais c'est paradoxal), par exemple quand on a juste des diarrhées mais pas de douleurs, où alors de ne se déplacer que dans des endroits où on est sûr d'avoir accès à des toilettes FACILEMENT et RAPIDEMENT! Mais c'est pas évident dans un magasin (en cas de crise impromptue comme cela m'est déjà arrivé) de demander à utiliser leurs toilettes, on n'ose pas, d'autant que c'est pour pourrir les lieux! Et alors je ne te parle pas des gaz par moment en période de crise où là sortir pour aller en cours, au boulot, chez des gens est un véritable enfer!!!
Merci du compliment c'est très gentil, je ne sais pas si je le mérite! Oui il m'arrive de prendre des compléments alimentaires régulièrement de type Alvityl! Mais être fatigué en permanence est dur à vivre pour soi et pour les autres.
EH non, pas de carte de priorité ou d'handicapé! Par contre, j'ai du mal m'exprimer. SI si si, c'est une ALD, heureusement! Imagine que le produit que je m'injecte tous les 14 jours coûte quelques milliers d'euros  les 2 seringues!!!!
AH oui parce que les traitement sont soit rares et chers, y en a pas 36 et ils ne soignent pas, ils aident juste à être mieux, soit basique: le spasfon, le doliprane ne me quittent jamais!
Les crises s'estompent par moment oui, après mon opération, je suis restée plusieurs années en forme! Précisement entre 2006 et 2010 avec de temps en temps une alerte mais globalement, ça allait! ET en 2011, rebelotte! J'en ai perdu mon travail! Ca c'est un autre aspect où je pourrais dire des choses!!!
ET depuis bah je suis pas à la fête malgré les piqûres d'humira! L'inflammation est revenue là où j'ai été opérée et me fait constamment souffrir, comme une brûlure, et je sais que je devrais repasser sur le billard!
Je pourrais aussi te parler de l'opération si tu veux!
Merci pour le lien, je regarderai!
On va pouvoir rédiger un livre avec nos échanges!!!
Si tu as d'autres questions, n'hésites pas et tu peux publier sans aucun soucis!
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